La gale est une maladie de la peau causée par un acarien microscopique appelé Sarcoptes scabiei hominis. Cette affection parasitaire se manifeste par de fortes démangeaisons, des lésions cutanées et un risque élevé de contagion. Elle touche tous les groupes d’âge, mais elle peut s’avérer particulièrement problématique chez les personnes âgées. Leur fragilité physique, la fréquence des comorbidités, et les conditions de vie collectives accentuent les risques de complications. Il est donc essentiel de se demander si la gale est plus dangereuse pour les personnes âgées, et si oui, pour quelles raisons précises.
Un système immunitaire affaibli avec l’âge
Le système immunitaire se modifie progressivement avec le vieillissement. Ce phénomène, connu sous le nom d’immunosénescence, affaiblit la capacité de l’organisme à se défendre contre les infections, y compris les infestations parasitaires. Chez une personne âgée, une simple attaque d’acariens peut dégénérer plus facilement, car la réponse immunitaire est moins rapide et moins efficace.
La gale ne fait pas exception à cette règle. Si une personne jeune et en bonne santé parvient souvent à contenir la prolifération des parasites, une personne âgée risque de développer une forme beaucoup plus envahissante. Par ailleurs, les symptômes peuvent être moins typiques chez le senior, ce qui peut retarder le diagnostic.
Des formes plus graves : la gale croûteuse
La forme la plus sévère de la gale est appelée gale croûteuse, ou gale norvégienne. Elle est rare dans la population générale mais relativement fréquente chez les personnes âgées, en particulier celles qui vivent en institution ou qui présentent un déficit immunitaire important.
Contrairement à la gale classique qui provoque une dizaine de sillons sur la peau, la gale croûteuse peut entraîner l’apparition de milliers, voire de millions d’acariens. Elle se manifeste par une peau épaissie, croûteuse, souvent malodorante, avec peu ou pas de démangeaisons. Cette absence de prurit contribue à retarder la détection. La gale croûteuse est non seulement plus difficile à traiter, mais elle est également beaucoup plus contagieuse, car la quantité d’acariens présents sur la peau est bien plus importante.
Des complications plus fréquentes
Outre les formes graves, les personnes âgées sont aussi plus susceptibles de développer des complications à la suite d’une gale mal soignée ou mal diagnostiquée. Les lésions cutanées provoquées par les démangeaisons peuvent s’infecter secondairement. Ces infections bactériennes, parfois bénignes chez les plus jeunes, peuvent devenir très préoccupantes chez un senior affaibli.
Une infection cutanée comme l’impétigo peut évoluer vers une cellulite bactérienne, voire une septicémie dans les cas les plus extrêmes. Chez une personne âgée, ce type de complication peut avoir des conséquences graves, voire fatales, surtout en présence de pathologies chroniques comme le diabète ou l’insuffisance cardiaque.
Un risque accru en collectivité
Les établissements accueillant des personnes âgées, comme les EHPAD, les foyers logements ou les hôpitaux gériatriques, sont des lieux propices à la propagation de la gale. La promiscuité, le contact physique régulier entre les résidents et le personnel, et les soins de proximité sont autant de facteurs favorisant la transmission.
Une fois introduite dans un établissement, la gale peut se propager rapidement si elle n’est pas détectée et traitée à temps. Plusieurs études ont démontré que les épidémies de gale en EHPAD sont fréquentes et difficiles à contenir. Le coût humain et logistique est important : isolement des patients, traitement massif du personnel et des résidents, désinfection complète des locaux.
Des diagnostics souvent tardifs
Le diagnostic de la gale chez les personnes âgées est souvent tardif, car les signes cliniques peuvent être atypiques. Les démangeaisons peuvent être absentes ou minimisées par des troubles cognitifs (comme la maladie d’Alzheimer), des traitements sédatifs ou des neuropathies. Les lésions cutanées peuvent aussi être confondues avec d’autres pathologies dermatologiques courantes chez les seniors, comme l’eczéma ou le psoriasis.
Ce retard dans la détection favorise non seulement la diffusion de la maladie, mais augmente également la sévérité de l’atteinte. Plus l’infestation dure dans le temps, plus le nombre d’acariens présents sur le corps augmente, et plus le traitement devient long et complexe.
Des traitements plus délicats à administrer
Chez les personnes âgées, les traitements doivent être adaptés avec prudence. Les produits antiparasitaires, bien que généralement efficaces, peuvent être mal tolérés par les peaux fragiles ou provoquer des effets indésirables chez des patients polymédiqués. Il faut également tenir compte des difficultés pratiques liées à l’application des traitements : certains seniors dépendants ont besoin d’aide pour se laver, s’habiller ou appliquer une crème sur tout le corps.
Dans les formes sévères comme la gale croûteuse, le traitement peut nécessiter une combinaison de médicaments par voie orale (comme l’ivermectine) et des applications cutanées répétées. Cela demande une coordination rigoureuse et un suivi médical rapproché.
Une vigilance accrue des aidants et du personnel soignant
Face à ces risques accrus, la prévention joue un rôle fondamental. Les aidants familiaux, les auxiliaires de vie et le personnel des établissements de santé doivent être formés à reconnaître les signes précoces de la gale chez les personnes âgées. Une simple suspicion doit conduire à une consultation médicale et à un isolement préventif pour limiter la contamination.
Il est également recommandé de sensibiliser les proches qui rendent visite aux résidents. La gale ne connaît pas de frontière d’âge : un enfant, un adulte ou un soignant porteur du parasite peut, sans le savoir, introduire la maladie dans une structure fragile.
Une désinfection rigoureuse de l’environnement
Le traitement de la gale ne se limite pas à la personne infectée. Il faut également traiter l’environnement. Chez les personnes âgées, cela implique de désinfecter les vêtements, les draps, les fauteuils, les matelas, et parfois même les aides techniques comme les fauteuils roulants. Tous les objets en contact prolongé avec la peau doivent être lavés à 60°C ou isolés dans un sac plastique pendant au moins 72 heures.
Dans les établissements collectifs, cette désinfection à grande échelle demande une organisation millimétrée, surtout si plusieurs cas sont détectés. Le traitement préventif du personnel soignant et des résidents non symptomatiques est souvent nécessaire pour endiguer la propagation.


